Aborder sa vie professionnelle avec philosophie

Soumis par agathe.renac le

Aborder sa vie professionnelle avec philosophie

Philosophe intervenant en entreprise, Laura Lange vise à rendre les managers tout à la fois curieux, audacieux et conscients. Adorant jouer avec les mots, elle intervient au sein de GERME et proposera prochainement une réflexion autour des fables de Jean de la Fontaine… Et de leurs multiples sens !

Qui est Laura Lange, l'interviewée ?

Laura Lange est Docteure en philosophie pratique, conférencière, chroniqueuse et experte APM. Elle intervient depuis plusieurs années dans les organisations professionnelles et a été récompensée, à ce titre, par le “Prix innovations du jeune entrepreneur de l’année 2013” à Lyon. Elle a écrit et joue actuellement à Lyon son premier spectacle : “Philosophons autour d’un vers de La Fontaine”. Elle a publié un essai : “Vers une maternité sans corps”, aux Editions de l’Observatoire, en avril 2022.

Quelle est votre approche de la philosophie ?

Elle est à la fois plurielle, pratique et ludique. Au-delà des thèses, la philosophie est une discipline du questionnement, de l’interrogation, sur soi, sur les autres, sur le monde qui nous entoure. C’est le pari de l’intelligence, du doute, la mise en action de notre esprit critique et de notre capacité à raisonner, à penser. Elle nous aide à vivre pleinement, les yeux grands ouverts, lucides, à “prendre de la hauteur pour se rendre auteur de sa vie.” La philosophie, c’est aussi le langage, les mots, leur sens, leur étymologie. J’aime pour ma part jouer avec les mots, leurs mystères, leur musicalité. Rendre les mots vivants, c’est les rendre motivants. Clarifier leur sens, notamment dans le monde du travail, c’est éviter que ces mots ne provoquent des maux.

 

Quel exemple de clarification pouvez-vous nous donner ?

Si la direction d’une entreprise soutient “qu’il va y avoir du changement”, il importe de préciser le sens que l’on donne à ce terme et d’incarner, de traduire cette affirmation par des illustrations concrètes. Là ou une personne verra dans le changement annoncé un bouleversement de ses habitudes qui va la mettre en situation d’inconfort, une autre le percevra comme une occasion d’évoluer, de prendre des initiatives, de mieux s’organiser. Il convient donc de donner un sens aux mots qui irriguent aujourd’hui la communication d’entreprise ; bienveillance, alignement sur nos valeurs, responsabilité… Les messages de la direction donnent le sens. Ils se doivent d’être clairs et cohérents. Car à n’en pas douter :“L’absence de cohérence crée de la co-errance”.

 

Quels conseils pourriez-vous donner aux managers de GERME ?

Être conscient, de soi en premier lieu, réfléchir à qui l’on est. Réfléchir, c’est ce que fait le miroir quand il vous renvoie votre image. Partant de ce point, s’extraire de son environnement habituel, sortir du cadre, de sa zone de confort et mettre en cause ses représentations, dépasser celles qui sont purement négatives pour être conscient de l’autre, des autres. Se creuser les méninges en faisant le ménage dans certaines de ses pensées et actions. Manager en se ménageant, et en aménageant de nouvelles pistes de réflexion et d’action. Prendre du recul et gagner en curiosité. Mais aussi s’inscrire dans une logique du doute. Notre époque est marquée par les fake news, les faux semblants, les informations sans nuances et les clivages très marqués. Il est important de creuser les informations que l’on reçoit, de se renseigner, se cultiver, lire, écouter des podcasts, prendre connaissance d’une opinion contraire à la sienne pour cultiver cette conscience, qui est le préalable à l’action.

Quel sera le thème de votre intervention au sein de GERME ?

Je m’appuierai sur les fables et les vers de Jean de La Fontaine pour questionner le rapport au travail de chacun. Le texte devient prétexte à une large réflexion.

 

Quels enseignements pouvons-nous tirer de ces fables ?

L’une des clés, à mon sens, est de dépasser la morale, de chercher les différents sens possibles de la fable. De prime abord, le lecteur est conduit vers une morale unique. Mais à y regarder de plus près, les fables sont riches de multiples interprétations. Prenez “ Le Lièvre et la Tortue”, par exemple, qui commence, comme chacun le sait, par ces mots : “Rien ne sert de courir, il faut partir à point.” Mais partir à point, c’est partir quand ? Et que dire de la dernière réplique de la Tortue au Lièvre : “De quoi vous sert votre vitesse ? Moi, l’emporter ! Et que serait-ce si vous portiez une maison ?” Que représente cette maison et son poids dans l’attitude de la tortue ? Quel parallèle peut-on établir avec les projets que l’on mène en entreprise, une maison commune à tous ceux qui y travaillent ? Les 243 fables de Jean de la Fontaine constituent plus que jamais une formidable matière à réflexion, un véritable terreau pour philosopher !

Découvrez cet article et bien d'autres dans le magazine GERME !

Saviez-vous que cet article fait partie du magazine "Managers" du réseau GERME ?  Retouvez-le dans votre pack d'adhésion avec le cycle de formation Germe ou Emergence et l'accès illimité aux événements GERME.
Logo