L'inclusion, une aventure collective ?

Soumis par sandrine.besnier le
L'inclusion, une aventure collective ?

De nombreuses études montrent que l’inclusion est facteur de performance, mais elle ne se décrète pas ! Cette belle aventure collective, qui concerne l’ensemble des collaborateurs s’inscrit dans un processus à long terme. Explications avec Pierre Meisel, cofondateur Jolokia, consultant diversité & inclusion, formateur et intervenant GERME depuis 2015.

 

« Une entreprise inclusive est une entreprise où chaque individu se sent à la fois accepté dans sa singularité et membre d’un collectif », définit Pierre Meisel. Comment faire ? « Il n’y a malheureusement pas de recette miracle ! » Néanmoins, le levier d’action le plus important consiste à prendre conscience des stéréotypes présents dans l’entreprise et à les effacer progressivement, en installant des règles qui favorisent le sentiment de justice. Les stéréotypes représentent en effet le plus grand frein à l’inclusion. Pourquoi recruter cette personne plutôt qu’une autre ? Simplement parce qu’elle a fréquenté la même école que nous ?

 

La vigilance de tous

« Première chose à faire dans l’entreprise : créer deux types d’indicateurs pour prendre conscience, explique Pierre Meisel. Certains, sur la discrimination, sont facilement objectivables par les RH (différence de revenus femmes-hommes, taux de féminisation des métiers, taux d’embauche des jeunes ou seniors...), et d’autres, ceux liés au sentiment d’inclusion des collaborateurs, vont impliquer toutes les équipes. » Ensuite, il s’agit de se fixer des objectifs et de former l’ensemble des collaborateurs. « On ne devrait pas parler de management inclusif. Dans l’entreprise, tous les collaborateurs sont responsables de l’inclusion, pas seulement les managers. On a besoin de la vigilance de tous pour y arriver ! »

 

Talents et innovation

Alors, pourquoi tendre absolument vers ce modèle d’entreprise inclusive ? Parce que les bénéfices sont nombreux : d’abord, cela permet de recruter de nouveaux talents, de fidéliser ses collaborateurs et de valoriser sa marque employeur. « Si on recherche, par habitude ou par facilité, des candidats uniquement, par exemple, parmi les hommes blancs de 35 à 45 ans, on se coupe de nombreux talents ! », précise Pierre Meisel. Le recrutement inclusif, lui, fait tomber les critères « écrans de fumée » qui n’ont en général pas grand-chose à voir avec les réelles compétences de la personne... Autres bénéfices de l’inclusion : l’amélioration de la qualité de vie au travail, l’engagement et surtout l’innovation ! « Dans une entreprise inclusive, on redécouvre les champs de la compétence et du collectif, ainsi que de nouvelles façons d’agir. Chacun peut y exprimer son potentiel. Et dans notre monde ultra-compétitif, cela fait la différence ! »

 

 

« Se confronter à l'expérience de l'autre »

Trois questions à Yann Kerninon, intervenant GERME, responsable du programme "Expérience terrain" de l'ESSEC* qui, depuis 2007, envoie chaque année 1000 étudiants en stage opérationnel ou ouvrier pendant un mois dans des entreprises ou des associations sociales.

 

À quoi sert l’Expérience terrain ?

Elle poursuit un double objectif : faire découvrir une organisation aux étudiants par le niveau le plus élémentaire et aussi les bousculer, les confronter à l’expérience de l’autre. Nous ne préjugeons pas de ce que cela va leur apporter. Et nous ne sommes pas là non plus pour leur faire une leçon de morale ! Nous leur faisons confiance.

 

Qu’en retirent les étudiants ?

C’est souvent pour eux une expérience surprenante, déstabilisante, qui déloge leurs certitudes et leurs a priori sur le milieu associatif, la fonction publique, la toxicomanie, etc. Ce n’est pas un stage d’observation, tous les étudiants sont au travail. Alors, quelques-uns se rendent compte de la pénibilité de certains métiers, d’autres changent de regard sur la pauvreté, d’autres encore reviennent à l’école en disant qu’ils ne veulent pas faire ça... C’est une prise de conscience.

 

Pourquoi avoir créé ces stages ?

Notre grande conviction, c’est la richesse de la rencontre de l’autre. Nous voulons faire gagner nos étudiants en maturité et leur faire comprendre qu’il existe une responsabilité sociale et humaine qui dépasse les simples tâches de management telles que la comptabilité, le marketing ou la production. Le manager ou le dirigeant n’est pas seulement gérant d’une entreprise : il évolue dans un environnement social complexe, fait de diversité. La rencontre de l’autre, la fraternité et l’inclusion ne peuvent pas résulter d’un décret, mais seulement d’expériences.

 

*École supérieure des sciences économiques et commerciales située à Cergy (95).

 

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