Quand faut-il déléguer quand on manage ?

Soumis par agathe.renac le
Thématiques
Gestion de crise
Intelligence collective
Management de la diversité
Softs skills
Leadership
Durée
20 minutes

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Cet épisode a été tourné depuis Bordeaux, avec des participants au cycle de formation en management Germe. Découvrez leurs retours sur comment déléguer auprès de ses équipes.

Dans cet épisode, des témoignages sur...

  • Quand faut-il déléguer ?
  • Déléguer vecteur de créativité ?
  • Le manager ne délègue-t-il que les missions qu’il n’aime pas ?
  • Comment recadrer une délégation mal lancée ?
  • Comment accompagner ses collaborateurs après leur avoir délégué un projet ?
  • Comment co-construire et déléguer avec un stagiaire ou alternant ?
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Qui sont les interviewés ?

  • Céline Godet, présidente de L’Échoppe, fabricant de vêtements de sécurité
  • Julien Lunardelli, co-fondateur de Lumiscaphe, éditeur de logiciel
  • Gregory Debliqui, directeur Commercial de CETIH, groupe industriel dans l’habitat
  • Bertrand Hassid, avocat d’affaires à Lexymore
  • Henry Dubourg, coach et animateur du groupe de formation Germe “Bordeaux Managerme”

Comment on délègue une mission inhabituelle ?

(Céline) Ça m'est arrivé et je me retrouve dans le cas où j’aimerai que ça avance sur un sujet et j’ai en tête une personne qui va pouvoir le faire parce qu'elle est brillante. Simplement, elle a déjà beaucoup de boulot. Et je ne sais pas trop comment lui demander, je ne veux pas imposer de timing. Je lui demande tout en lui disant que je peux l’aider. Mais je pense qu’elle n’a pas vraiment compris si elle était missionnée ou pas et n’a pas l’impression d’être en charge de ça. Comme elle n'est pas très sûre, elle avance doucement, probablement en se disant qu’elle va attendre plus d’instruction, et tout le monde est déçu finalement. La mission manque de cadrage.

À l’heure actuelle c'est toujours en cours, ça s'est fait un petit peu autrement. Je me suis dit qu’avec cette personne, on allait travailler un autre sujet. Et cette fois-ci, elle a pu faire de bout en bout, il y avait un bon cadrage initial, et surtout, je lui ai vraiment confié.

À quel moment on considère qu'il faut remettre les choses à plat suite à un mauvais cadrage d’une mission ?

Il a pu se passer plusieurs semaines avant que j'ose retourner vers elle en disant « Est-ce que tu as pu avancer sur le sujet ? » et qu'elle ne m’en dise pas grand chose. J’ai attendu encore deux, trois semaines avant un entretien formel, parce qu'à ce moment-là arrive l'entretien annuel, c'est une pure coïncidence. Je lui dis « Sur ce sujet-là, j'aurais bien aimé que tu avances. » Et on a enfin une discussion où elle me confie “Oui, Céline… je peux avancer, mais si tu me donnes un minimum de cadrage, d'objectif, de date, etc”. Il y a aussi un problème de légitimité aussi de cette personne à porter ce type de sujet. C'était un problème de cadrage plus que de sujet, c'est clair. Après, il y a des sujets qui sont plus circonscrits que d'autres.

Comment choisir ce qu'on délègue et comment faire quand on délègue une mission inhabituelle ?

(Bertrand) Alors non effectivement, parce qu'en principe, l'inhabituel : soit on ne fait pas, dans la production juridique en tout cas soit ça va être vraiment la charge des associés. Ce qui est inhabituel et urgent, on va tenter de le traiter directement sans mettre cette charge sur les collaborateurs. Par contre, si on a de l'inhabituel et du pas urgent, là, on va pouvoir travailler en équipe. Aujourd'hui, la production juridique est de plus en plus spécialisée. Donc, il faut vraiment voir qui peut traiter le sujet.

Pour bien déléguer cela nécessite du temps, de l'expérience. Comme on n'a pas de marge d'erreur dans la production, on va mettre en stress un collaborateur si on lui délègue comme ça en urgence.

Comment ça peut être reçu par le managé quand son manager lui délègue une mission inhabituelle ?

Ça dépend du collaborateur, comment il le traite :

  • soit on est vraiment en phase et avec assez peu de formalisation le collaborateur prend le sujet et le traite de façon impeccable.
  • soit j'ai de la friction, de l'opposition, du questionnement, et ce qui fait que moi, quand je délègue, c'est pour m'enlever de la charge de travail, mais aussi de la charge mentale.

 

(Julien) Parfois, les questions qui sont posées, c'est parce que j'ai envie d’avancer, mais d’autres fois, ça me renvoie à mes propres incertitudes ou des choses que je n'ai pas forcément creusées. Donc on pose des questions, est-ce que c'est vraiment pertinent de prendre tel affaire ?J’ai parfois envie de rétorquer quand on me dit « Mais pourquoi ? Comment ? » , j'ai envie de dire « pas de questions, on avance » , alors que parfois, c'est peut-être légitime.

Un témoignage d'un moment où vous n'avez pas eu le choix que de déléguer ?

(Henry) Alors oui. C'était il y a quelques années quand j'étais salarié dans une boîte de 200 personnes et il y avait cette Responsable du service généraux qui dépendait de moi. Il fallait qu'elle évolue. Ça a été l'échec total. Elle a refusé toutes les formations. Et pourtant, j'avais confiance en elle par sa volonté, sa posture. Je me rendais compte de la difficulté qu'aurait cette personne à évoluer et je n'ai pas voulu le voir. Et ça a été un échec.

Elle n'avait pas, à l'égard des autres, la légitimité pour progresser. Donc déjà, elle se mettait un peu mal à l'aise. Et elle refusait d'avancer. Quand j'ai quitté cette entreprise, ça n'avait pas avancé. Et avec le recul, aujourd'hui, je me dis, j'ai peut-être fait une erreur. Celle de ne pas admettre que chacun a son seuil d'incompétence. Et que notre difficulté première, c'est, en tout cas la mienne, c'est de ne pas admettre ça. Je fais confiance à tout le monde, je dis “oui, il est capable”, alors que pas forcément.

Y a-t-il un contexte favorable à la délégation ? Est-ce que ça pourrait aider de couper en partie la mission et faire progresser la personne sur un bout ?

Dans ce cas précis non, cette personne devait avancer sur le plan technique. Elle ne l'avait jamais fait, elle était dans l’administratif. Donc le gap était très important. Il s’agissait de faire un pari. Est-ce que techniquement, elle va pouvoir s'intéresser à ça ? Elle disait oui, mais elle ne le montrait pas. Donc finalement déléguer, parfois, ça peut être contre-productif si on ne lit pas entre les lignes.

Quels bénéfices à déléguer des missions inhabituelles à ses collaborateurs ? C’est un vecteur de créativité ?

(Julien) Il faut donner à ses collaborateurs des choses inhabituelles parce que ça les transforme. Ça les sort de leur zone de confort. Ils ont toujours tendance à partir d'une ligne parce qu'on leur a dit de faire ça. Et puis, quand on leur dit d'un seul coup, “c'est toi qui vas faire ça “, en fait ça les surprend et on voit la vraie personnalité des gens. Et il y en a qui, en fait, je pense, étaient frustrés de ne pas le faire.

Je suis directeur commercial. j'ai cinq managers. Et j'ai donné la chance aux cinq en même temps. D'être autonome sur leur secteur, dans les plans d'action, dans les remontées top et flop. On a vu la réaction des cinq différentes. Et à la fin, ça se passe bien. Alors, il faut faire attention parce qu’il y a des erreurs qui sont faites. Mais il faut l'accepter, en fait. Mais à la fin, tout le monde a bien aimé avec des niveaux différents.

Comment accompagner ses collaborateurs quand on leur délègue une mission en autonomie ?

(Julien)Je laisse la porte ouverte en fait. C'est-à-dire que s'ils ont des questions à me poser avant, je leur dis qu’ils peuvent me les poser. Ils peuvent aussi s’aider entre eux. On l'a testé 3-4 fois depuis et ça y est, ils se sont pratiquement mis tous en place. Et lors de la dernière réunion sur le sujet, je suis tombé malade la veille, donc ils l'ont faite sans moi et ça s'est bien passé.

Quel type de mission déléguez-vous le plus en tant que manager ?

Ouais, c'est ce que je délègue le plus. Quand j'ai repris cette entreprise d'une petite vingtaine de personnes, on n'était même pas dix. Le patron, qui était mon père, faisait tout, le commercial, les achats, la gestion. Et je me suis dit, je n'ai pas le choix, en fait. Il faut que j'embauche quelqu'un sur le commercial parce que je ne sais pas faire. Et encore aujourd'hui, je suis souvent sollicitée par des connaissances qui me disent, “j'aurais tel ou tel besoin de vêtements”. ce à quoi je répond “Oui, je vais vous orienter vers un vrai commercial dont c'est le métier.”

Comment vivez-vous la confiance en votre collaborateur quand vous déléguez ?

Oui, si je délègue, c'est que je n'ai pas le choix. C'est-à-dire que si j'ai quelque chose à faire, je le fais. Et si ça ne rentre pas, il faut que je trouve quelqu'un pour le faire à ma place. C'est le seul moment où je délègue. Sinon, il n'y a pas de raison de déléguer. Après, si on fait une proposition au client qui est moins bonne que celle que j'aurais fait moi, c'est toujours mieux que de ne rien proposer.

Ça m’est arrivé d’avoir une idée pour répondre à un client, mais je n'ai pas le temps. Je délègue à un collaborateur, et tout de suite, ça devient un peu compliqué, puisque j'ai un peu de friction. Pas d'opposition, mais de questionnement. Donc, je ne suis pas à l'aise. Du coup, je suis quand même le projet de loin et je me rends compte que le délégataire, qui est plutôt un manager, il prend en charge une partie technique lui-même. Parce que j'ai le sentiment qu'il n'ose pas demander à d'autres collaborateurs, il a du mal à transmettre la réalisation technique de la chose. Du coup, il le prend en charge lui-même. Je ne suis pas à l’aise car je ressens de la friction par rapport à la mission, et en plus, je ne suis pas à l'aise avec sa manière d'exécuter. Mais au final, franchement, j'étais plutôt satisfait du résultat qui était produit et qui était un peu mieux que ce que j'espérais.

(David) Tu as perçu comme une résistance dans le questionnement, ça a été aussi propice à vous faire avancer l'un et l'autre.

(Julien) Oui, comme je disais, ce que j'ai perçu comme une forme de résistance, c'est qu'en fait, il mettait le doigt sur mes propres doutes. Disons que les questions qu'il pose, elles m'embarrassent un peu, parce que parfois, je n'ai pas forcément la réponse. Au début, je l'ai pris comme “il m'embête, il n'a pas envie de le faire” et au final on peut le prendre sur la perspective de “ses questions sont légitimes, il ne peut pas tout avoir en tête comme moi, il veut bien faire”.

Des idées pour déléguer des animations de réunion ?

(Henry) Nous avons des comités de direction avec ordre du jour et compte rendu tournants. Je pars de l'idée que la délégation c'est d'abord la confiance, et puis ça nous fait gagner du temps, et ça motive les autres. A partir de là, j'ai essayé d'organiser dans une boîte, un truc qui n'est pas révolutionnaire, mais qui a bien marché après beaucoup d'hésitations.

Les CODIR, au lieu d'être organisés exclusivement par la même personne, généralement le directeur général, la règle a été posée qu’ils soient organisés par chaque membre du CODIR de façon alternative chaque semaine. Au début, la phase d’acceptation n’a pas été évidente, ils se sont dit “ah une charge de travail en plus”. Puis ils se sont rendus compte, parce qu'il y a eu aussi une pression sur eux, que finalement, c'était pas mal . Parce qu'ils ont profité pour faire passer de façon plus ouverte leurs propres idées. C’est une manière leur fait confiance pour établir le CODIR. Ils sont motivés et ils sont satisfaits finalement. Ça a déchargé la personne qui traditionnellement était en charge de l’organisation du CODIR.

(Grégory) Nous depuis 6 mois au CODIR, l’ordre du jour est donné par tout le monde en fait. C'est-à-dire qu'il est sur l'intranet, un fichier vierge, et c'est à nous de le remplir.

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